Arrivé devant un fast-food juste au moment où celui-ci fermait, un jeune homme insiste grossièrement pour être servi malgré tout ; au moment où il se présente à la caisse, quelque chose lui saute dessus et le tue… Sur son corps, un badge des employés du fast-food est retrouvé. Derwood Pinks, qui a déjà un casier judiciaire chargé, a justement perdu le sien, mais c’est sur Rob Roberts que l’attention de Mulder se porte…
Mais il est très bon, cet épisode ! La première fois, il m’avait déjà bien plu, mais au revisionnage je lui ai trouvé plein d’éléments malins et intéressants et une tension permanente jouissive du fait qu’on sent bien que Rob ne pourra pas s’empêcher de tuer.
Montrer tout l’épisode de son point de vue est une vraie bonne idée, dans cette saison 7 qui en aura compté beaucoup de mauvaises sous prétexte de faire original, d’autant que c’est montré sans grands effets tape-à-l’œil, de façon simple et efficace.
Le plus simplement du monde, Rob est le premier personnage à apparaître à l’écran après la victime, Mulder et Scully n’apparaissent qu’après lui et encore c’est bel et bien depuis le comptoir où est Rob qu’on les voit entrer, par la suite c’est lui qui a le plus de temps d’antenne, et parfois la caméra braque et zoome certains objets ou personnes comme si c’était lui qui les fixait du regard.
C’est d’ailleurs comme ça que la faim de Rob est montrée : gros plan sur ce qu’il fixe du regard, ralenti, comme si le monde s’arrêtait autour de sa cible, morphings discrets (les steaks qui lui apparaissent sous forme de cervelles, le gros monsieur dont le cerveau apparaît à travers le crâne) et la musique, très banale en dehors de ça, qui s’emballe tout à coup. C’est malin, bien foutu, on arrive bien à se mettre à la place de Rob, et même ses discours dans lesquels il explique la faim dont il souffre sont brillamment écrits : moi qui ai souffert de troubles alimentaires, je me rends compte en revoyant cet épisode que j’aurais pu parler exactement comme Rob à cette époque.
Bref, on l’a compris, en tant que monstre de la semaine, Rob est un personnage particulièrement original et bien travaillé par le scénariste, que l’écriture et l’interprétation ont rendu attachant. Pour commencer, l’acteur Chad Donnella a clairement une bonne tête ; mais surtout, en suivant toute l’histoire du point de vue de son personnage, on voit constamment combien il souffre de sa différence, combien il regrette le mal qu’il fait, et ses efforts pour éviter d’en faire. Ainsi, même s’il est un monstre par nature, c’est sa part d’humanité qui nous est montrée. La question de l’humanité (en quoi elle consiste, quelle est sa limite…) est donc clairement posée par cet épisode, et elle l’est intelligemment.
Par ailleurs, Rob est tout aussi intéressant sous sa forme de monstre : sans oreilles, sans pilosité, les traits du visage estompés et les yeux voilés, il n’est plus qu’un nez et une bouche pour humer et savourer ce(ux) qu’il mange ; sous cette forme, il m’inspire moins le mutant homme-requin évoqué par Scully qu’une intéressante allégorie de la faim : l’homme s’efface pour n’être plus que la bouche par laquelle il se nourrit (matériellement) sans arriver à apaiser sa faim (spirituelle). J’adore.
Et encore, même sous cette forme, sa psy voit toujours Rob en lui, et d’une certaine façon, le spectateur aussi. Et c’est cette révélation (Je suis Rob Roberts ET je suis un monstre), qui le pousse in fine à choisir de mourir…
Face à lui, on ne voit Mulder que quelques minutes et Scully encore moins : du point de vue de Rob, c’est Mulder le méchant ! Retournement génial… D’ailleurs, comme l’histoire centrée sur Rob ne suit pas les réflexions et investigations de Mulder, on ne sait qu’indirectement pourquoi il en vient à suspecter Rob, ce qui fait qu’il prend l’apparence d’un persécuteur, un emmerdeur qui a fait de Rob sa tête de turc. Même ses lignes de dialogues ont été écrites avec plus d’ironie et de morgue qu’à l’accoutumée pour le faire paraître plus désagréable aux yeux de Rob.
Quant à Scully, par les yeux de Rob tout ce qu’on saura d’elle c’est que Mulder n’est pas d’accord avec elle… Analyse de la MSR vue par une tierce personne plus pertinente que dans la plupart des épisodes consacrés à la MSR !
Bref, un épisode réellement intéressant à plusieurs titres, pour lequel mon seul reproche sera que rien n’explique pourquoi Rob est anormal.